Alina Habba adore la mode. Avec une petite préférence pour les sacs à main. Non seulement elle en parle à tout bout de champ, mais son compte Instagram déborde de frime, de faste et de fringues. De là à faire carrière dans le luxe, il n'y a qu'une taille de compte en banque: la vingtaine trébuchante, elle dit fuck à son job chez Marc Jacobs et se rue sur les bancs de la Widener Law Commonwealth University. Le droit, ça paie. Mais ça permet aussi, un peu moins de vingt ans plus tard, de prononcer cette phrase devant un nuage de journalistes:
Lundi, Me Alina Habba, 39 ans, s'est jetée une énième fois dans la fosse aux lions pour défendre Donald Trump jusqu'à plus soif. Déterminée, l'avocate a bouffé les micros (et la lumière) que les télévisions lui tendaient pour commenter le témoignage du patron, dans le cadre de son procès pour fraude. En un mot? Furax.
Plus qu'un boulot, Alina est en guerre. Depuis deux ans, celle qui fut pourtant une discrète spécialiste en droit immobilier du New Jersey s'envoie elle-même au casse-pipe, tel un bouclier humain en Louboutin, pour sauver les fesses d'un milliardaire dans la mouise. Et son premier pavé dans la mare médiatique avait fait trembler tout le pays.
En septembre 2021, peu après avoir évincé l'éminent Me Marc E. Kasowitz, Donald Trump mandate une inconnue pour flanquer un procès au cul de sa nièce et celui du New York Times. Pour faire court, Mary L. Trump aurait fourgué plusieurs documents financiers de sa famille à trois journalistes, leur permettant de rafler le Pulitzer. Tout ça en dévoilant comment cette dynastie évitait les flèches du fisc.
Un an plus tôt, le 14 juillet 2020, la psychologue sortait un bouquin explosif sur son oncle, baptisé Comment ma famille a créé l'homme le plus dangereux du monde, qui déterrera une hache de guerre (probablement) pour l'éternité. Vous l’aurez compris, Mary déteste Donald. Et Mary déteste Alina. Alors, sur son podcast, elle étrille le duo quotidiennement depuis le début du procès pour fraude, à New York.
Depuis qu'elle ne lâche plus son patron d'une inculpation, Alina Habba tape sur tout ce qui bouge. Si elle est capable d'insulter des journalistes, des juges, des greffières et des démocrates, elle ne ménage manifestement pas non plus ses employés. L'année dernière, trainée en justice par l'une de ses anciennes assistantes juridiques, cette passionnée de golf a finalement réglé l'affaire en sortant son porte-monnaie.
Tenez-vous bien: la jeune femme, afro-américaine, l'accusait de se lancer régulièrement dans des impros de rap racistes, au beau milieu de l'open-space, en faisant rouler le n-word entre ses lèvres rouge sang. Pire, elle aurait perdu ses nerfs contre la procureure générale de New York, Letitia James, après avoir subi un sérieux revers: «Je déteste cette salope noire!»
Oui, cette Letitia James qui accuse aujourd'hui la Trump Org. de gonfler ses actifs. Décidément.
Bien sûr, Alina va suer pour démentir, feindre la bienveillance et le progressisme de son cabinet, mais sa réputation, dans le grand bain des magistrats américains, sera sévèrement éclaboussée. Jusqu'aux autres membres de la team légale de Donald Trump qui, depuis son arrivée, goûtent peu les manières cavalières de la dame. Simple querelle déontologique ou franche jalousie? Disons qu’en trois petites années, Alina s'est imposée comme la plus proche et la plus solide confidente du candidat républicain. Un exemple? Le 28 mars, elle s'affichait tout sourire aux côtés d'un Donald aux petits soins, venu fêter personnellement ses trente-neuf printemps.
D'ailleurs, saviez-vous que l'avocate a monté son cabinet à six petites minutes en voiture du green de Donald Trump, à Bedminster? Si la véritable histoire est tenue secrète, on sait qu'elle s'est rendue, un jour d'été 2019, sur la propriété du président des Etats-Unis. C'est là qu'ils auraient fait connaissance. Quelques mois plus tard, «Habba, Madaio and Associates LLP» empoignait ses premiers dossiers.
Que s'est-il réellement passé entre deux trous? Que se sont-ils dit ce jour-là pour que Donald Trump décide de mandater, en septembre 2021, cette jeune et discrète conseillère d'une inoffensive société de parking du New Jersey? Mystère. Quoiqu’il en soit, l'entourage du milliardaire ne tardera pas à médire sur leur relation, qualifiée de «secrète» et «fusionnelle», au point de propager des rumeurs autrement moins platoniques.
Et certains de ses détracteurs continuent aujourd'hui d'affirmer qu’elle n’a été embauchée que pour son physique.
Mariée depuis 2020 au philanthrope Gregg Reuben, cette fille de parents irakiens élève trois enfants issus d'une précédente union et ne tarit pas d'éloges sur sa «fantastique» vie de famille. Ce qui ne l'empêchera pas de jeter ses mioches dans les bras du «G.O.A.T.», une fois sur le cuir beige de Trump Force One.
A vrai dire, les bougons ont raison de se méfier. Loin de n'être que l'avocate d’un Trump au civil, Alina Hanna est d'abord sa porte-parole favorite et notamment de «Save America», principal comité d'action politique du candidat. Envoyée au charbon dès que ça sent le roussi, celle qui aime parfois se présenter comme «l'Arabe catholique» dort littéralement sur les plateaux de télévision. Bonne cliente, redoutable, redoutée, grande copine des caméras et habile à l'oral, la chouchoute adore faire voyager la culture populiste à travers les Etats-Unis.
Conservatrice farouche, armée de son credo «Guns, God, Country», elle n'a eu aucune peine à accepter la mission, foutrement périlleuse, d'injecter le virus Trump dans les veines du peuple américain et de tout faire pour réinstaller son mentor à la Maison-Blanche. Et depuis que l'accusé-candidat est sommé par la justice de la fermer entre deux audience, l'avocate-porte-parole-conseillère-confidente-amie n'arrête pas de gagner en importance.
Au péril de sa carrière? Disons que vu le sort réservé par Donald Trump à ses plus fidèles alliés, une fois la lune de miel périmée (coucou Rudy Giuliani), on ne peut que souhaiter à Alina Habba une victoire écrasante du candidat républicain en 2024. Car toute motivée qu'elle soit, la qualité d'un avocat se mesure toujours plus facilement au nombre de victoires qu'aux années de prison.